15 avril 2015
Amiante : une seule plaque pleurale suffit pour être reconnue comme maladie professionnelle
Il n’y a pas de définition légale de la maladie professionnelle. Selon la Caisse Nationale d’Assurance Maladie (la CNAM), « on peut toutefois indiquer qu'elle est la conséquence de l'exposition plus ou moins prolongée à un risque lors de l'exercice d'une activité professionnelle » (voir l’article à ce sujet).
La reconnaissance de la maladie professionnelle est simplifiée, lorsqu'elle est référencée dans les tableaux des maladies professionnelles
Selon le deuxième alinéa de l’article L.461-1 du code de la sécurité social, pour qu’une maladie soit présumée d’origine professionnelle, il faut qu’elle soit répertoriée dans un des tableaux du régime général ou agricole de la Sécurité sociale. Il existe 98 tableaux relatifs au régime général et 57 tableaux concernant le régime agricole (voir les tableaux sur site : INRS-MP.fr)
Chacun de ces tableaux précise les conditions à remplir, pour qu’une maladie soit présumée d’origine professionnelle :
- le délai de prise en charge (pendant lequel, la maladie doit être diagnostiquée, même si aucun lien n’est fait avec le travail effectué),
- la durée d'exposition au risque le cas échéant,
- la liste limitative ou indicative des travaux effectués.
Arrêt n°14-15165 du jeudi 2 avril 2015, Cour de cassation, Chambre civile 2
Un ancien salarié, ayant été exposé de manière prolongée à l’amiante, se fait diagnostiquer une plaque pleurale (qui s’est développée sur la plèvre, qui permet au poumon de changer régulièrement de volume). Il décide alors de souscrire le 3 juin 2010, une déclaration de Maladie professionnelle en se fondant sur le tableau n°30 B de la Sécurité sociale (voir ici) , concernant les affections professionnelles consécutives à l'inhalation de poussières d'amiante.
La caisse primaire d’Assurance maladie de la Charente (la CPAM) rejette alors sa demande, au motif qu’il ne présente pas une pathologie correspondant à celle prévue par ce tableau. En effet, la CPAM rappelle que le tableau n° 30B exige la constatation de « plaques pleurales » au pluriel et que, par conséquent, une plaque ne permet pas de déclencher la présomption.
La victime saisit alors une juridiction de sécurité sociale. Par la suite, appel est interjeté. La Cour d’appel de Bordeaux dans un arrêt du 6 février 2014, ne fait pas droit à l’argumentation de la CPAM. Cette dernière forme alors un pourvoi en Cassation.
Le 2 avril 2015, la deuxième Chambre civile de la Cour de cassation rejette le pourvoi formé. En effet, elle estime que l'emploi du pluriel renvoie à une désignation générique des lésions. Dès lors qu'est constatée la présence d'une plaque pleurale, les conditions relatives à la désignation de la maladie sont remplies.Par conséquent, puisque la victime a développé une plaque pleurale liée à une exposition professionnelle à l’amiante, elle peut bénéficier d’une prise en charge de sa pathologie au titre du tableau 30 B.
Les plaques pleurales, sont les conséquences les plus fréquentes liées à l’amiante. Selon Andeva (l’Association Nationale de Défense des Victimes de l’Amiante), deux personnes malades de l’amiante sur trois en sont atteintes. Selon elle, « les lésions pleurales s’accompagnent très souvent d’une gêne respiratoire et de douleurs » (voir article). Il est donc indispensable qu’elles soient reconnues comme des maladies professionnelles. En effet, il ne faut pas oublier que la réparation résultant d’une maladie professionnelle est beaucoup plus favorable à la victime, que celle de l’assurance maladie. De plus, une victime d’accident du travail ou d’une maladie professionnelle est prise en charge, sans condition préalable d’assurance ou d’affiliation.
Cet arrêt facilite donc cette reconnaissance, en ne s’arrêtant pas à la lettre du tableau 30B, mais en s’attachant à sa finalité, qui est de reconnaître comme maladies professionnelles, les affections consécutives à l'inhalation de poussières d'amiante durant le temps de travail.
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Pour aller plus loin : concernant la reconnaissance de la maladie professionnelle




